De l’évolution des relations entre théorie et pratique entre 1750 et 1850
De l’évolution des relations entre théorie et pratique entre 1750 et 1850 : l’architecture hydraulique de Bélidor à Navier en passant par Prony
L’Architecture hydraulique de Bélidor, dont la première édition paraît entre 1737 et 1739, va constituer le manuel de références des ingénieurs pendant quasiment un siècle pour ce qui touche aux problèmes pratiques d’écoulement, de constructions et de machines hydrauliques. Critiqué pour ses erreurs et ses lacunes théoriques par plusieurs académiciens (dont Bossut, Condorcet et D’Alembert) au cours des années 1760 et 1770, l’ouvrage fera tardivement l’objet d’une version annotée par Navier, publiée en 1819, afin, comme l’expliquent les quatre rapporteurs de l’Académie, Poisson, Girard, Fourier et Prony, « d’y faire les corrections et additions que l’état actuel des connaissances rend indispensables ». Entre temps, Prony avait lui-même publié une Nouvelle architecture hydraulique, en 1790 et 1796, dans le but avoué de réconcilier théorie et pratique « en préparant les spéculateurs et les praticiens à parler une langue commune », c’est-à-dire en donnant « aux premiers du goût pour l’observation », et en faisant sentir « aux seconds les inconvénients et même les dangers du tâtonnement ». Car l’intérêt de ce corpus est bien là : tenter de saisir l’évolution des rapports entre mathématiques, expérimentation et application pratique au travers de trois architectures rédigées pour des acteurs, les ingénieurs, dont le champ de compétences ne s’étend et ne se redéfinit pas sans mal au cours de la période ainsi considérée.