Photographie des couleurs versus photographie en couleur
La conférence porte sur un épisode fondamental de l’histoire de la photographie, qu’elle cherchera à interpréter à l’aide d’analyses économiques du progrès technique.
Le rapprochement de la photographie et de la couleur a eu lieu lors de l’avènement de la seconde révolution industrielle. Deux approches technologiques radicalement opposées ont vu le jour au tournant des XIXe et XXe siècles : la méthode indirecte qui cherchait à créer des images colorées à partir du jeu combiné et pondéré de deux ou trois filtres à la prise de vue et au tirage ; la méthode directe, due au physicien G. Lippmann, qui enregistre les ondes lumineuses sur une surface sensible et peut restituer objectivement les couleurs. Sur le plan épistémologique, les centaines de procédés de photographie en couleurs ayant conduit à des dépôts de brevets en Europe et aux États-Unis relèvent d’un empirisme expérimental brouillon aiguisé par l’appât de la notoriété, du pouvoir ou du gain alors que la photographie des couleurs se fonde sur des principes théoriques de la physique pour en extraire rationnellement une application utile à la société. La méthode interférentielle de Lippmann sera consacrée par le prix Nobel de Physique en 1908, mais cette invention géniale ne trouvera aucun relai dans le monde économique qui la juge impraticable. De fait, un auparavant, les frères Lumière commercialisent leur autochrome, matérialisation ingénieuse des rêves de la méthode trichrome appliquée à un unique support sensibilisé. Là est l’innovation technologique, qui leur permettra d’imposer au monde leur monopole sur le marché émergent de la photographie en couleurs.
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