La passion du jeu d’hier à aujourd’hui
La société française s’interroge de nos jours sur le phénomène du jeu excessif. Elle s’inquiète de l’augmentation – jusqu’à présent ininterrompue – des montants investis dans les très nombreux jeux de hasard offerts aux amateurs, ainsi que de la croissance rapide des jeux où l’on parie de l’argent sur Internet. Elle éprouve l’impression d’être submergée par une offre ludique qui semble menacer l’équilibre des plus fragiles et, dans les cas extrêmes, conduire à des catastrophes personnelles et familiales. Dans un tel contexte, la comparaison avec l’histoire du jeu de hasard et d’argent à l’époque moderne se révèle salutaire. Cette comparaison permet de mieux cerner les proportions du phénomène actuel, d’examiner si la société moderne a ressenti les mêmes craintes, de comprendre comment elle considérait la passion de ses contemporains pour ces jeux et comment elle a réagi.
Il apparaît en effet que les temps modernes ont connu un développement accéléré des jeux de hasard, les jeux d’alea comme les définit le philosophe Roger Caillois, dans lesquels on mise toujours plus d’argent. On peut citer, entre autres, les jeux de hasard qui se pratiquaient avec des cartes, tels le lansquenet, le pharaon, la barbacolle, la bassette, la dupe, le 30 et 40 et la belle, et qui – de différentes manières –, opposaient un banquier à des pontes. S’y ajoutaient les jeux où l’on déposait les mises sur un carton ou sur un tableau à l’image du hoca ou du loto, du quinquenove ou du passe-dix. Les loteries, d’abord épisodiques, puis tolérées pour des raisons de bienfaisance, n’étaient pas moins importantes. Elles furent institutionnalisées en France par l’État royal avec la création, en 1757, de la Loterie royale militaire, destinée à financer la construction de l’École Royale Militaire et plus tard, en 1776, avec la création de la Loterie royale de France. La fondation de cette dernière a marqué un tournant dans l’histoire des jeux de hasard et d’argent en France, car l’État est alors devenu un opérateur de jeux, un rôle qui s’est maintenu depuis 1933, avec la Loterie nationale et ses héritiers, la Société de la loterie nationale et du loto national (1976), France Loto (1989) et La Française des Jeux (1991), devenue FDJ en 2009. Ces considérations historiques nous font comprendre combien il est important d’analyser le discours des temps modernes sur le jeu de hasard et d’argent, de rechercher s’il existait alors des joueurs excessifs avant d’envisager l’évolution actuelle des représentations sociales en matière de jeu de hasard et d’argent.
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